Les origines de Zagreb


L'histoire de Zagreb est celle d'une ville dédoublée en DEUX BOURGS RIVAUX juchés sur deux collines séparées par une rivière, la Medvedščak (assêchée au XXème siècle): Gradec ou Grič, qui était habitée par la noblesse et la bourgeoisie et Kaptol, la ville ecclésiastique épiscopale. C'est de cette confrontation que naquit la capitale qui s'étend aujourd'hui du mont Medvenica au nord jusqu'au-delà de la Save au sud: Entre la première mention de la ville en 1094 et l'unification administrative de Gradec et Kaptol en 1850, il y a une histoire mouvementée que racontent les premières salles du musée.

Gradec et Kaptol Manteau de Ladislas I Fontaine rue St-Blaise Bienheureux Augustin Kazotic Maquette de la Haute Ville
Image 1: Si, à la fin du 11ème siècle, les conditions économiques et politiques se prètaient à la création d'un évêché à Zagreb, c'est qu'il y avait à cet endroit une cité assez importante pour devenir le siège d'un évêché.
La fortification (GRADEC) qui protègeait ce site peuplé dès la préhistoire avait été détruite lors de l'invasion mongole en 1241. Le roi de Hongrie-Croatie Béla IV (1235-1270) la reconstruisit et, pour attirer de nouveaux habitants (Slaves Hongrois, Allemands et Italiens), fit de ce bourg une ville libre dotée de privilèges particuliers. Ils étaient énoncés dans la Bulle d 'Or de 1242 dont une copie est exposée au musée. Cette ville qui n'était soumise qu'au roi lui même, fut entourée d'une fortification et dotée de sa propre église, Saint Marc.

Image 2: Le roi de Hongrie Ladislav I Arpadović (cf. Titre du roi Ladislav "Ladizl. Reg." brodé sur un manteau conservé au trésor de la cathédrale de Zagreb) avait reçu la Croatie en héritage. Depuis 845 jusqu'à la mort du dernier roi en "mir" (Trpimir, Branimir, Tomislav, Krešimir) Dimitar Zvonimir (1075 - 1089) le ROYAUME CROATE jouissait de la reconnaissance de ses territoires par les autres états européens. Mais Zvonimir mourut sans enfant et son beau-frère hongrois, également connu sous le vocable de "Saint Ladislas" (1049-1095) incorpora la Croatie à la Hongrie en 1091. Cette UNION HUNGARO-CROATE devait durer plus de 4 siècles jusqu'à l'arrivée des Turcs et la conquête de la Hongrie par Soliman le Magifique (bataille de Mohàcs en 1526).
Comme l'atteste le premier document écrit mentionnant la cité, Ladislav fonda en 1094 l'évêché de Zagreb qu'il plaça sous la dépendance de l'archevêque hongrois d'Esztergom. Il voulait ainsi créer des liens solides entre la Hongrie et Rome, en faisant de Zagreb une nouvelle étape sur la route des pèlerinages allant d'Europe occidentale jusqu'à la Terre sainte, à la libération de laquelle appelait instamment le pape de l'époque, Urbain II. Au siège du nouvel évêché le roi Ladislav convoqua des chanoines dont il fit les coadjuteurs du premier évêque (tchèque) de Zagreb, Duh.
Rapidement la colline du Chapitre (KAPTOL) se couvrit de constructions. Les chanoines édifièrent leurs curies le long de la rivière Cirkvenik (Medveščak) La cité était protégée naturellement à l'est par un ensemble de viviers appelé Ribnjak. Les statuts de Kaptol de 1334 stipulaient que chaque chanoine avait droit à une maison. Ces premiers occupants furent suivis par d'autres ordres monastiques (Templiers, Dominicains, Franciscains, Cisterciens) et par l'évêque lui-même qui se fit construire un palais au sud de la cathédrale.
Au 12ème s. fut créée l'Ecole de Kaptol, fréquentée tant par des jeunes gens ayant une vocation religieuse que par des laïcs. On donnait des spectacles à caractère sacré devant la cathédrale et ce furent les premières représentations théâtrales. Le roi Ladislav fit don à l'évêque de Zagreb d'importantes propriétés foncières, faisant de lui le plus puissant suzerain de la Slavonie médiévale. La fondation et l'édification de l'évêché de Zagreb constituent l'événement le plus important de l'histoire de Zagreb et de la Croatie.

Image 3: La légende relie, on le sait (grâce à M. Puntijar!), la création de Zagreb à la source Manduševac près de la place Jelačić. Pour cacher cette origine païenne, lorsque la superstructure du puits du 23 rue St Blaise fut installée, à l'initiative de l'évêque de Zagreb, Maximilien Vhrovac en 1823, on apposa sur le rebord une dédicace qui évoque le Bienheureux Augustin Kazotić (1260-1322). En voici la traduction:" Au nom de Dieu très bon et très haut/ Puise l'eau de félicité à la source du Sauveur (Isaïe, G. 12, V 3). Dieu fit jaillir cette eau accédant aux prières/ Du bienheureux Augustin Kazotić, éveque de Zagreb./ Maximilien Vhrovac, prêtre de la très sainte église/ a posé cette pierre en 1823. "

Image 4: Le bienheureux Augustin Kazotić, évêque de 1303 à 1323 (huile sur toile de Johann Jacobe, Vienne 1747).
Entre 1512 et 1520, on détruisit le monastère des Dominicains ainsi que l'église conventuelle située près de la source "Zagreb", qu'avait fait construire l'évêque de Zagreb qui était l'abbé de cet ordre. L'une des légendes à propos de l'origine du nom de Zagreb est liée à cette source et à cet évêque. Ce dernier apportait tous ses soins à l'école de la cathédrale (une des principales institutions relevant du Chaptitre permanent - Stolni Kaptol), grâce à laquelle Zagreb était devenu le plus important centre d'enseignement de Croatie et de Slavonie au moyen-âge. C'est à cet évêque que l'on doit le renouveau de la liturgie par l'introduction du chant choral - le chant pratiqué à Zagreb était connu sous le nom de Zagrebački obred (rite de Zagreb). En 1702 il fut officiellement béatifié et le Pape Clément XI confirma la décision de la congrégation qu'il fasse l'objet d'une vénération publique. En 1747, quand ce portrait fut réalisé, on érigea dans la cathédrale un autel orné d'une statue en marbre du bienheureux Augustin Kazotić et l'on fit venir de Naples un autre portrait du prélat. Le chanoine Adam Baltazar Krčelić rédigea sa biographie. Le conservateur préposé à la cathédrale, Stjepan Pucza, fit l'acquisition d'un certain nombre d'oeuvres d'art pour décorer cet autel.

Image 5: Cette maquette représente la colline de Zagreb au XVIIIème siècle, bien avant les restaurations d'Hermann Bollé. La ville royale libre comptait en plus de l'Ecole, un hôpital, des bains publics et un hôtel de la monnaie. Les querelles d'intérêts, conflits de propriété, luttes dynastiques avec la cité épiscopale étaient incessants. Cependant des trèves étaient observées lors des grandes foires annuelles. Soixante corporations différentes existaient à Gradec dès le 14ème siècle. Les évêques faisaienr venir à Zagreb des peintres italiens pour décorer les batiments religieux.
Ce n'est qu'au XVIème siècle que la menace des Ottomans qui parvinrent jusqu'au pied de l'enceinte fortifiée de la cathédrale, ramena le calme dans cette ville agitée.

Les armes de Zagreb


Sabres turcs Saint Blaise Ancien drapeau municipal Aigle à deux têtes Armes de la ville
Image 1: La menace ottomane. Le 30 septembre 1469, les Ottomans remportaient la victoire à la bataille du Turopolje (non loin de Zagreb) et menaçaient Zagreb. Les habitants de Grič et de Kaptol restaurèrent en toute hâte les antiques fortifications.
Après la conquête par les Turcs de la Bosnie, l'évêque Oswald Thuz fit construire autour de la cathédrale et du palais épiscopal, dans le jardin au sud de la cathédrale, des fossés et des murailles (disparus aujourd'hui).
En 1476/1478 les chanoines firent fortifier la colline du Kaptol, ce qui transforma complètement sa structure sociale et la physionomie du quartier. Le long de la muraille occidentale, on construisit le quartier (aujourd'hui, la rue) Opatovina et les sujets de l'évêque furent priés de s'y installer. Pour parer au danger turc, les évêques Luka Baratin et Šimun Erdödy flanquèrent la cathédrale de tours et de murailles (1500-1520). Au 17ème siècle on ajouta une tour de 70 m puis un clocher faisant office de tour de guet. La cathédrale avait l'allure d'une forteresse et c'en était une.
On dota les fortifications de Gradec d'une garnison espagnole. La menace ottomane cessa en 1591, mais les fortifications de la Haute-Ville figurent toujours sur les armes de Zagreb. On en trouve la plus ancienne représentation sur un sceau apposé à un document de Gradec datant du 14ème s.

Image 2: Le 3 février, jour de la St. Blaise, protecteur de Gradec (image 2), conformément à la tradition et aux dispositions de la Bulle d'Or, l'administration municipale se réunit dans l'hôtel de ville "Vechnicza" de la place Saint-Marc qui y est situé depuis le Moyen-âge. On commença par invoquer le Saint Esprit, puis la séance continua par la rédaction de documents et l'apposition de sceaux. En outre le juge de la ville et les jurés furent élus, de nouveaux citoyens accueillis et des citoyens méritants honorés.
Saint Blaise, sur cette huile sur toile datant de 1749 est célébré sur la colline de Gradec comme le défenseur de la Ville libre et royale. En 1749, le sieur Adam Ballogh, juge municipal, fit peindre aux frais de la municipalité ce tableau pour décorer le logement de fonction qui lui appartenait, comme en témoigne une inscription en latin au verso du tableau.

Image 3: Dès le début du 15ème s. on mentionne le drapeau de la ville de Gradec qui fut arboré au clocher de l'église Saint-Marc. Le plus ancien drapeau municipal conservé date du début du 18ème s. Il est de couleur ROUGE, orné en son centre des armes peintes de la ville. (cf. 3ème image ci-dessus)

Image 4: Sur le drapeau de la Garde de Zagreb, peint par Franjo Postl en 1790 (4ème image), on a surimposé aux armes de l'Autriche, d'un côté celles de la ville libre et royale de Zagreb et de l'autre l'image de Saint Marc, un des saints protecteurs de Gradec.
L'organisation de cette garde en 1789 répondait au danger que faisait peser, de loin, sur la ville la Révolution française. Or il y avait à Zagreb des Croates et des Autrichiens et chaque nation avait sa propre garde. Ce drapeau fut créé en l'honneur du couronnement du roi de Hongrie-Croatie, Léopold II, pour les troupes zagréboises de nationalité autrichienne. Tel qu'il était à l'origine, il fut hué par les patriotes croates de la garde municipale, en particulier par les maîtres de la Guilde des "faiseurs" de boutons qui se plaignirent auprès des magistrats de la ville, assurant qu'il revenait aux Autrichiens de respecter les usages du lieu..."Quand on est reçu chez quelqu'un, on se soumet aux exigences légitimes de son hôte."

Image 5: A la fin du 19ème s. les armes de la ville prennent leur aspect définitif: un fond BLEU, considéré comme la couleur officielle de Zagreb. Les armes, le drapeau, la chaine d'honneur du maire et l'insigne des échevins sont des symboles, tant officiels que traditionnels, de la ville royale libre.


Diplome de citoyen de Zagreb remis à un citadin particulièrement méritant