Mano a mano (1923)

Partie sans enjeu

Paroles de Celedonio Flores (1896-1947)

Musique de Carlos Gardel/ José Razzano (1887-1960)

Rechiflado en mi tristeza, te evoco y veo que has sido en mi pobre vida paria sólo una buena mujer. Tu presencia de bacana puso calor en mi nido, fuiste buena, consecuente, y yo sé que me has querido como no quisiste a nadie, como no podrás querer. Se dio el juego de remanye cuando vos, pobre percanta, gambeteabas la pobreza en la casa de pensión. Hoy sos toda una bacana, la vida te ríe y canta, Ios morlacos del otario los jugás a la marchanta como juega el gato maula con el mísero ratón. Hoy tenés el mate lleno de infelices ilusiones, te engrupieron los otarios, las amigas y el gavión; la milonga, entre magnates, con sus locas tentaciones, donde triunfan y claudican milongueras pretensiones, se te ha entrado muy adentro en tu pobre corazón. Nada debo agradecerte, mano a mano hemos quedado; no me importa lo que has hecho, lo que hacés ni lo que harás... Los favores recibidos creo habértelos pagado y, si alguna deuda chica sin querer se me ha olvidado, en la cuenta del otario que tenés se la cargás. Mientras tanto, que tus triunfos, pobres triunfos pasajeros, sean una larga fila de riquezas y placer; que el bacán que te acamala tenga pesos duraderos, que te abrás de las paradas con cafishos milongueros y que digan los muchachos: Es una buena mujer. Y mañana, cuando seas descolado mueble viejo y no tengas esperanzas en tu pobre corazón, si precisás una ayuda, si te hace falta un consejo, acordate de este amigo que ha de jugarse el pellejo pa'ayudarte en lo que pueda cuando llegue la ocasión.

Retranché dans ma tristesse Je pense qu’il ne me reste Dans ma vie, cette bougresse Qu’une brave femme : toi ! Ta prestance de patronne Réchauffait mon nid, oui, bonne Mais bonne avec conséquence Et tu m’as aimé, je pense Comme tu n’aimas personne, Comme aime qui n’aime pas. C’est assez de devinettes : Notre pauvre midinette A su prendre sa retraite Esquivant la pauvreté : Et te voilà, vraie patronne Qui ris à la vie, fredonnes. Quant au cave, ses pépettes A la volée tu les jettes Ainsi joue le chat esthète Avec le rat apeuré. Aujourd’hui ta coupe est pleine D’illusions creuses et vaines, Encombrée d’énergumènes, De consoeurs et du patron ; La milonga de la haute, Aux tentations idiotes Où triomphent les boiteuses Et prétentieuses danseuses, Est entrée en toi, la gueuse En ton cœur et tout au fond ! Te remercier ? A quel titre ? Jouions-nous pour des pépites ? Qu’importe ce que vous fîtes Que vous faites ou ferez ! Moi, les faveurs accordées Je crois les avoir payées Mais si quelque dette entrave Ce calcul, ce n’est pas grave : C’est sur le compte du cave Qu’il convient de la solder Cependant que tes triomphes, Cette pauvre outre qui gonfle, Forment une file longue De richesses, de gaietés. Que ton protecteur s’assure Que sa pompe à thunes dure, Pour faire une place nette Aux milongueurs proxénètes Qui diront lors de leurs fêtes : « La brave femme, en effet ! » Tu sais que la décadence Guette ta beauté, je pense, Et dès lors, plus d’espérances Dans ton pauvre cœur si bon. S’il te faut alors une aide, Ou le conseil d’un collègue Rappelle-toi qu’il existe, Tout prêt à prendre des risques Il t’aidera, cet artiste, A la première occasion.






Interprêté par Carlos Gardel en 1923





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